Au début, je n’étais la maman que de Poussin. J’étais heureuse de pouvoir me consacrer entièrement à mon petit garçon, et lui était ravi d’avoir une maman toujours disponible. Le week-end et le soir c’était encore mieux, Poussin avait une maman et un papa rien que pour lui et il en profitait pleinement ! Je ne saurais dire si c’est une question de caractère ou de mode de vie (enfant unique d’une maman au foyer) mais il avait ses petites habitudes de patachon et réclamait TOUTE notre attention. J’avoue que parfois ça a pu être pesant de n’avoir que les siestes et les nuits de ce petit être comme temps de repos, qu’il y a des moments où j’aurais aimé lire 3 mails pendant qu’il jouait à mes côtés, ou que le week-end nous aurions aimé pouvoir discuter à deux sans qu’un gnome chevelu ne fasse mille âneries pour nous rappeler son existence (des fois qu’on l’aurait oublié dans notre appart jonché de jouets et de fringues de bébé…). Mais dans l’ensemble, nous étions heureux, nous avions un équilibre à trois et tout allait pour le mieux.
Toutefois, avoir d’autres enfants et agrandir notre famille était une évidence pour nous. Sans pour autant savoir quand. Pas trop vite pour se laisser du temps, pas au moment de l’entrée à l’école du Poussin, pour ne pas le chambouler, pas trop tard pour si un jour on en voulait trois, pour ne pas être trop vieux, et pour plein d’autres raisons encore. Bref, Poussin ne serait sûrement pas fils unique, mais pas tout de suite !
Et puis la vie est faite d’imprévus, de surprises et de « on verra bien« . Mon précédent article évoquait la genèse de Poussin, je peux bien aussi vous révéler celle de Belette ! Il était une fois un changement de contraception, deux semaines de battements où nous avons fait le choix de l’insouciance parce qu’il y avait peu de risques, parce que sans médocs ça ne risquait pas de marcher, parce qu’on n’avait pas envie de passer à la pharmacie, et parce que de toute façon ce serait une jolie surprise ! Trois semaines après j’avais des nausées, j’étais infoutue de re-calculer les jours de mon cycle, et je suis finalement passée à la pharmacie. Il me fallait du shampoing et des vitamines pour bébé, j’en ai profité pour acheter un test de grossesse… Devant mes deux barres roses, j’ai ri, j’ai pleuré, j’ai déboulé dans le bureau de mon mari et puis j’ai pensé « mon pauvre Poussin ». Ben oui ! Parce que tout de suite, avant de penser à l’amour fraternel qu’il allait connaître, aux jeux échangés, à la complicité et au plaisir d’être ensemble, j’ai imaginé qu’il aurait du mal à partager sa maman. Son papa aussi évidemment, mais sa maman encore plus. Bon, ça c’était vraiment sur le moment, en réaction à l’annonce de ce nouveau bébé, encore toute chamboulée mais déjà gorgée d’hormones ! Ensuite j’ai relativisé, savouré notre chance et imaginé tous les trucs chouettes que cette naissance nous permettrait de vivre. Et finalement, j’ai trouvé que pile deux ans, c’était plutôt sympa comme différence d’âge. Quoi qu’il en soit, ni pire ni mieux qu’un autre écart.
Pendant toute ma grossesse, j’ai préparé mon Poussin à ce changement. Je voulais évidemment préserver mon bébé, lui apporter toute l’attention dont il avait besoin, lui faire comprendre que bien des choses allaient changer mais que sa maman serait toujours là pour lui. Je savais que souvent les réactions des aînés peuvent être difficiles, que parfois il serait en colère, qu’il pourrait m’en vouloir et avoir envie de ramener sa petite soeur à la maternité… Je le savais et en même temps je voulais l’éviter. Tout en sachant que c’est normal, je me disais que si on pouvait limiter la colère et apaiser notre Poussin ce serait mieux. Parce que normal ou pas, ce n’est agréable pour personne ! J’ai mis un point d’honneur à être toujours disponible pour lui. Pour que jamais il ne s’imagine que je l’abandonne, pour qu’il ne se sente jamais menacé, pour qu’il n’ait pas l’impression de perdre sa maman. Ma grossesse ne devait pas être un frein à nos jeux, à nos sorties, au temps passé ensemble, bref à notre relation. Même une fois la Belette sortie de mon ventre. J’ai lutté contre la fatigue et la flemme, parfois contre la douleur (douleurs ligamentaires, mes fidèles compagnes de grossesse !), mais j’ai continué à jouer, à aller au parc, à me lever… J’ai évité de trop déléguer, de trop faire garder, j’ai continué les séances de piscine, les sorties au marché… Avec un gros ventre ou avec une Belette en écharpe, j’ai voulu être présente à ses côtés. Et bien sûr j’ai culpabilisé quand je ne pouvais pas, quand la fatigue était trop forte, quand je le laissais aller au parc juste avec son papa le dimanche, quand je ne les ai pas accompagnés aux séances de bébés nageurs… Malgré tout, dans l’ensemble j’étais plutôt contente et fière de moi, d’avoir réussi à couver un bébé sans délaisser l’autre. Surtout que pendant les trois premiers mois de sa vie, Belette était un bébé très calme, bonne dormeuse, (oui, oui, je parle au passé, depuis elle se transforme souvent en petit gremlins !), il me restait donc pas mal de temps à consacrer à Poussinou.
Mais comme tout n’est jamais si simple, comme parfois les précautions ne suffisent pas, les débuts à quatre ont été difficiles. Il faut dire aussi qu’entre l’arrivée de sa petite soeur et la crise des 2 ans (le fameux terrible two), notre Poussin avait de quoi être en colère et chaque occasion était un nouveau prétexte à crise ! On a beau savoir que ça risque d’être difficile, ça fait mal ! Et quand on a passé des mois à lutter contre la fatigue et la flemme pour limiter la casse, on trouve ça injuste ! Entendre « non t’aime maman » ou « pas bisou maman », ça pique fort fort fort dans le coeur. Les crises à gérer pile au moment du bain de la Belette ou de son bib, avoir l’impression qu’on ne peut pas s’occuper de notre nouveau bébé sans houspiller le plus grand en même temps, c’est lourd. Il y a vraiment des jours où je me demandais quand je pourrais profiter pleinement de ma petite fille, tellement son frère m’accaparait ! Ca fait triste pour celui qui se fait gronder, ça fait triste pour celle qui ne peut jamais profiter d’un moment de calme avec sa maman, ça brûle au fond de la gorge, et ça file mal à la tête. Encore plus quand le plus grand découvre qu’il peut taper sur la tête de sa soeur ou la mordre, de préférence juste après lui avoir fait un énorme câlin… Ca aussi c’est normal, pour attirer l’attention de maman (peut importe si on me gronde, du moment qu’on s’occupe de moi…) et aussi pour décharger un trop plein. Mais pas facile à gérer ! Bien sûr on a parlé, rassuré, expliqué, câliné, mais ce fut long et pénible.
C’est finalement le temps qui a fait que les choses sont rentrées dans l’ordre. Plus de tapes, moins de colères, et un équilibre à quatre qui a pu se mettre en place. Hasard ou pas, ça a correspondu à notre départ en vacances suivi de notre déménagement. Et juste là en tapant ces lignes, je viens de tilter que ça correspond pile au moment où Poussin et moi avons passé presque 2 jours rien que tous les deux ! Pour cause de voiture trop petite pour caser 2 sièges auto et une caisse de chat, Papa-des-Champs, Belette et Chachon sont partis en voiture le dimanche matin tandis que Poussin et moi les avons rejoint en train le lendemain. Ces 2 jours ensemble ont été géniaux, mon petit garçon a été adorable, nous avons profité une dernière fois de « son » square nantais, terminé quelques cartons et surtout nous avons joué, joué, et joué ! Si ça se trouve c’est notre Clio qui a sauvé notre équilibre familial, classe !
Aujourd’hui, Poussin est encore très demandeur d’attention, et il ne perd pas une occasion pour avoir une histoire ou quelqu’un qui joue avec lui. C’est comme ça, c’est sa façon d’être et on s’en accomode. En tous les cas, la vie est bien plus agréable depuis que notre petit garçon s’est apaisé. Ses progrès de langage ne sont pas non plus étrangers à cette sérénité. Depuis qu’il est capable de faire des phrases, de se faire complètement comprendre, et qu’il commence à exprimer ses sentiments, nous arrivons beaucoup mieux à anticiper ses frustrations et à les gérer. Et même si on ne peut toujours pas répondre à toutes ses sollicitations, nous pouvons beaucoup plus rapidement lui expliquer pourquoi. L’autre grand changement, c’est que nous pouvons en rire et ainsi dédramatiser. L’entendre me dire « Tu poses Belette sur le tapis et tu joues avec moi », ou « Je veux Maman que pour moi » c’est bien plus mignon et attendrissant que de le voir se rouler par terre en hurlant pendant que je change ladite Belette ! Il y a une dizaine de jours, Belettoune (le surnom n’est pas de moi !) se réveillait de sa sieste et le babyphone nous fait donc entendre quelques couinements alors que Poussin et moi jouions. Je lui fais remarquer qu’il y a eu un bruit de Belette, et lui de me répondre « non c’est un chien »…Sous-entendu, non non pas la peine de te déplacer, on peut continuer à jouer ! Bon, il a insisté 5 bonnes minutes avec son histoire de chien et il avait vraiment l’air embêté de perdre mon exclusivité, mais en expliquant calmement et fermement, avec un gros câlin en prime, c’était réglé Et depuis on en rigole en se demandant quel animal ça peut bien être lorsque le babyphone se déclenche ! Parfois elle fait des cris tellement effrayants qu’on jurerait entendre un troll de la forêt ;o)
Etre une maman en partage, c’est fatiguant, usant, culpabilisant et parfois énervant. Mais quand on termine une journée en ayant l’impression que chaque enfant a eu l’attention qu’il voulait, qu’on a pu passer de bons moments tous ensemble et qu’on a aussi pu profiter de quelques tête-à-tête avec chacun, c’est bien agréable ! Si un jour j’arrive à trouver une recette pour doubler ma patience et me faire pousser un troisième bras, on tentera le challenge du petit troisième…ou pas ;o)