Archives mensuelles : octobre 2012

Histoire de Porte

Histoire de Porte

Je m’apprête à évoquer un sujet qui sans aucun doute passionnera les foules : une porte !

Celle-ci :

En plus traiter de sujets palpitants, je suis une pro de la photo…

Pas très originale et habituellement plutôt cradouille au niveau des petits carreaux, surtout celui jouxtant la poignée. En regardant bien on y aperçoit très souvent un petit millier d’empreintes digitales correspondant aux petits doigts agiles d’un garçonnet de deux ans et demi. Et de la poussière, plein ! Sauf aujourd’hui parce que ce matin j’ai fait les vitres, chose assez rare pour mériter d’être soulignée! Cette porte n’a donc aucune caractéristique particulière. Elle n’est pas magique, ne s’ouvre pas seule, ne permet d’accéder à aucun passage secret, et elle n’est pas non plus auto-nettoyante. Dommage !

Cette porte n’a pour seule fonction que de séparer notre salon de notre couloir, tout en permettant un passage entre ces deux zones. C’est peu et en même temps c’est malgré tout le but premier d’une porte. Sauf que nous, avant d’emménager ici, on avait fondé de doux espoirs avec cette porte ! Et que nous avons été déçus… Je m’explique, ne fuyez pas tout de suite ! Dans la configuration de notre maison, une longère, cette porte fait donc communiquer notre « partie jour » (cuisine et salon) et notre « partie nuit » (un couloir qui dessert donc les chambres et la sdb). Il y a même une petite différence de niveau pour encore mieux marquer la séparation : les deux marches que Belette va devoir apprendre à gérer rapidement et que Poussin saute joyeusement après avoir pris son élan sur toute la longueur du couloir… Je plaisante mais si je mets de côté les potentiels vautrages que cela représente, je trouve ça très joli. Bref, avant d’habiter la maison, Papa-des-Champs et moi-même étions enchantés que les deux parties de la maison soient aussi bien isolées l’une de l’autre. On allait enfin pouvoir faire du bruit dans le salon sans déranger le sommeil des enfants, on était contents de pouvoir fermer la porte pour éviter que le chat ne s’incruste dans les chambres trop souvent (et surtout pas la nuit !), et on imaginait que cette porte permettrait de retenir les odeurs de cuisine. En plus, on la trouve plutôt jolie.

Sauf qu’en journée, cette porte n’est jamais fermée…

Poussin n’y pense pas tout le temps, et de toute façon lorsqu’il se retrouve en bas des petites marches, il doit galérer en se mettant sur la pointe des pieds pour parvenir à refermer la poignée. Ou alors il reste en haut en se contorsionnant sur les 10cm qu’il lui reste pour mettre ses pieds, il s’agace parce qu’il n’y arrive pas, et moi je me dis qu’il va finir par tomber ou par casser un truc. L’aider à la refermer ? Merci, j’y ai pensé ! Sauf que lorsque je suis dans la cuisine j’ai souvent les mains occupées à nourrir sa soeur, faire à manger, étendre du linge, et que ce n’est pas forcément pratique de tout arrêter pour fermer une porte. Lorsque je suis affalée sur le canapé et qu’il me rejoint après sa sieste, là j’ai juste la flemme… Quant à Papa-des-Champs, il pense à refermer la porte le soir, mais sinon il oublie. Ou alors il trimbale des trucs encombrants qui le privent de l’usage de ses mains.

En été, quand les fenêtres sont ouvertes, ça fait des courants d’air et la porte se claque d’elle-même. Pratique, mais à long terme je ne suis pas sûre que les mignons petits carreaux survivent longtemps… Le reste du temps c’est donc ouvert. Le chat peut ainsi se déplacer à son aise et pousser le vice jusqu’à aller se vautrer dans les placards du couloir… Il peut aussi déambuler dans les chambres pour quémander quelques câlins quand je joue avec les enfants, et par la même occasion il disperse tous les bouts de feuilles mortes et autres merdouilles qu’il ramasse en se roulant dans le jardin… Et bien sûr, les odeurs de cuisine peuvent envahir à leur gré la totalité de la maison… C’est bien agréable lorsqu’il s’agit de gâteau au chocolat ou de brioche, mais beaucoup moins les jours de chou-fleur ou de soupe aux poireaux ! Malheureusement, chez nous les soupes et les légumes qui sentent mauvais sont plus souvent au menu que les gâteaux maison…

La porte en laquelle nous fondions tous nos espoirs s’est ainsi révélée trompeuse. Je rêvais d’une chambre qui ne sente plus jamais le brocolis, et c’est foutu ! En prime je retrouve des miettes de jardin sur le parquet des chambres…M’enfin, c’est quand même bien de ne plus avoir de chat dans les pattes quand on va faire pipi la nuit, et de ne pas le retrouver sur la couette en retournant se coucher !

Voilà, ça valait le coup d’écrire un article sur ce soucis ménager de la plus haute importance ! Je peux aller me coucher avec un net sentiment de soulagement, et en pensant à prendre une photo de la porte demain matin :-) Maintenant vous savez que j’aime écrire le soir mais que la plupart du temps je suis tellement fatiguée que j’attends le lendemain pour me relire et poster !

 

Maman en partage

Maman en partage

Au début, je n’étais la maman que de Poussin. J’étais heureuse de pouvoir me consacrer entièrement à mon petit garçon, et lui était ravi d’avoir une maman toujours disponible. Le week-end et le soir c’était encore mieux, Poussin avait une maman et un papa rien que pour lui et il en profitait pleinement ! Je ne saurais dire si c’est une question de caractère ou de mode de vie (enfant unique d’une maman au foyer) mais il avait ses petites habitudes de patachon et réclamait TOUTE notre attention. J’avoue que parfois ça a pu être pesant de n’avoir que les siestes et les nuits de ce petit être comme temps de repos, qu’il y a des moments où j’aurais aimé lire 3 mails pendant qu’il jouait à mes côtés, ou que le week-end nous aurions aimé pouvoir discuter à deux sans qu’un gnome chevelu ne fasse mille âneries pour nous rappeler son existence (des fois qu’on l’aurait oublié dans notre appart jonché de jouets et de fringues de bébé…). Mais dans l’ensemble, nous étions heureux, nous avions un équilibre à trois et tout allait pour le mieux.

Toutefois, avoir d’autres enfants et agrandir notre famille était une évidence pour nous. Sans pour autant savoir quand. Pas trop vite pour se laisser du temps, pas au moment de l’entrée à l’école du Poussin, pour ne pas le chambouler, pas trop tard pour si un jour on en voulait trois, pour ne pas être trop vieux, et pour plein d’autres raisons encore. Bref, Poussin ne serait sûrement pas fils unique, mais pas tout de suite !

Et puis la vie est faite d’imprévus, de surprises et de « on verra bien« . Mon précédent article évoquait la genèse de Poussin, je peux bien aussi vous révéler celle de Belette ! Il était une fois un changement de contraception, deux semaines de battements où nous avons fait le choix de l’insouciance parce qu’il y avait peu de risques, parce que sans médocs ça ne risquait pas de marcher, parce qu’on n’avait pas envie de passer à la pharmacie, et parce que de toute façon ce serait une jolie surprise ! Trois semaines après j’avais des nausées, j’étais infoutue de re-calculer les jours de mon cycle, et je suis finalement passée à la pharmacie. Il me fallait du shampoing et des vitamines pour bébé, j’en ai profité pour acheter un test de grossesse… Devant mes deux barres roses, j’ai ri, j’ai pleuré, j’ai déboulé dans le bureau de mon mari et puis j’ai pensé « mon pauvre Poussin ». Ben oui ! Parce que tout de suite, avant de penser à l’amour fraternel qu’il allait connaître, aux jeux échangés, à la complicité et au plaisir d’être ensemble, j’ai imaginé qu’il aurait du mal à partager sa maman. Son papa aussi évidemment, mais sa maman encore plus. Bon, ça c’était vraiment sur le moment, en réaction à l’annonce de ce nouveau bébé, encore toute chamboulée mais déjà gorgée d’hormones ! Ensuite j’ai relativisé, savouré notre chance et imaginé tous les trucs chouettes que cette naissance nous permettrait de vivre. Et finalement, j’ai trouvé que pile deux ans, c’était plutôt sympa comme différence d’âge.  Quoi qu’il en soit, ni pire ni mieux qu’un autre écart.

Pendant toute ma grossesse, j’ai préparé mon Poussin à ce changement. Je voulais évidemment préserver mon bébé, lui apporter toute l’attention dont il avait besoin, lui faire comprendre que bien des choses allaient changer mais que sa maman serait toujours là pour lui. Je savais que souvent les réactions des aînés peuvent être difficiles, que parfois il serait en colère, qu’il pourrait m’en vouloir et avoir envie de ramener sa petite soeur à la maternité… Je le savais et en même temps je voulais l’éviter. Tout en sachant que c’est normal, je me disais que si on pouvait limiter la colère et apaiser notre Poussin ce serait mieux. Parce que normal ou pas, ce n’est agréable pour personne ! J’ai mis un point d’honneur à être toujours disponible pour lui. Pour que jamais il ne s’imagine que je l’abandonne, pour qu’il ne se sente jamais menacé, pour qu’il n’ait pas l’impression de perdre sa maman. Ma grossesse ne devait pas être un frein à nos jeux, à nos sorties, au temps passé ensemble, bref à notre relation. Même une fois la Belette sortie de mon ventre. J’ai lutté contre la fatigue et la flemme, parfois contre la douleur (douleurs ligamentaires, mes fidèles compagnes de grossesse !), mais j’ai continué à jouer, à aller au parc, à me lever… J’ai évité de trop déléguer, de trop faire garder, j’ai continué les séances de piscine, les sorties au marché… Avec un gros ventre ou avec une Belette en écharpe, j’ai voulu être présente à ses côtés. Et bien sûr j’ai culpabilisé quand je ne pouvais pas, quand la fatigue était trop forte, quand je le laissais aller au parc juste avec son papa le dimanche, quand je ne les ai pas accompagnés aux séances de bébés nageurs… Malgré tout, dans l’ensemble j’étais plutôt contente et fière de moi, d’avoir réussi à couver un bébé sans délaisser l’autre. Surtout que pendant les trois premiers mois de sa vie, Belette était un bébé très calme, bonne dormeuse, (oui, oui, je parle au passé, depuis elle se transforme souvent en petit gremlins !), il me restait donc pas mal de temps à consacrer à Poussinou.

Mais comme tout n’est jamais si simple, comme parfois les précautions ne suffisent pas, les débuts à quatre ont été difficiles. Il faut dire aussi qu’entre l’arrivée de sa petite soeur et la crise des 2 ans (le fameux terrible two), notre Poussin avait de quoi être en colère et chaque occasion était un nouveau prétexte à crise ! On a beau savoir que ça risque d’être difficile, ça fait mal ! Et quand on a passé des mois à lutter contre la fatigue et la flemme pour limiter la casse, on trouve ça injuste ! Entendre « non t’aime maman » ou « pas bisou maman », ça pique fort fort fort dans le coeur. Les crises à gérer pile au moment du bain de la Belette ou de son bib, avoir l’impression qu’on ne peut pas s’occuper de notre nouveau bébé sans houspiller le plus grand en même temps, c’est lourd. Il y a vraiment des jours où je me demandais quand je pourrais profiter pleinement de ma petite fille, tellement son frère m’accaparait ! Ca fait triste pour celui qui se fait gronder, ça fait triste pour celle qui ne peut jamais profiter d’un moment de calme avec sa maman, ça brûle au fond de la gorge, et ça file mal à la tête. Encore plus quand le plus grand découvre qu’il peut taper sur la tête de sa soeur ou la mordre, de préférence juste après lui avoir fait un énorme câlin… Ca aussi c’est normal, pour attirer l’attention de maman (peut importe si on me gronde, du moment qu’on s’occupe de moi…) et aussi pour  décharger un trop plein. Mais pas facile à gérer !  Bien sûr on a parlé, rassuré, expliqué, câliné, mais ce fut long et pénible.

C’est finalement le temps qui a fait que les choses sont rentrées dans l’ordre. Plus de tapes, moins de colères, et un équilibre à quatre qui a pu se mettre en place. Hasard ou pas, ça a correspondu à notre départ en vacances suivi de notre déménagement. Et juste là en tapant ces lignes, je viens de tilter que ça correspond pile au moment où Poussin et moi avons passé presque 2 jours rien que tous les deux ! Pour cause de voiture trop petite pour caser 2 sièges auto et une caisse de chat, Papa-des-Champs, Belette et Chachon sont partis en voiture le dimanche matin tandis que Poussin et moi les avons rejoint en train le lendemain. Ces 2 jours ensemble ont été géniaux, mon petit garçon a été adorable, nous avons profité une dernière fois de « son » square nantais, terminé quelques cartons et surtout nous avons joué, joué, et joué ! Si ça se trouve c’est notre Clio qui a sauvé notre équilibre familial, classe !

Aujourd’hui, Poussin est encore très demandeur d’attention, et il ne perd pas une occasion pour avoir une histoire ou quelqu’un qui joue avec lui. C’est comme ça, c’est sa façon d’être et on s’en accomode. En tous les cas, la vie est bien plus agréable depuis que notre petit garçon s’est apaisé. Ses progrès de langage ne sont pas non plus étrangers à cette sérénité. Depuis qu’il est capable de faire des phrases, de se faire complètement comprendre, et qu’il commence à exprimer ses sentiments, nous arrivons beaucoup mieux à anticiper ses frustrations et à les gérer. Et même si on ne peut toujours pas répondre à toutes ses sollicitations, nous pouvons beaucoup plus rapidement lui expliquer pourquoi. L’autre grand changement, c’est que nous pouvons en rire et ainsi dédramatiser. L’entendre me dire « Tu poses Belette sur le tapis et tu joues avec moi », ou « Je veux Maman que pour moi » c’est bien plus mignon et attendrissant que de le voir se rouler par terre en hurlant pendant que je change ladite Belette ! Il y a une dizaine de jours, Belettoune (le surnom n’est pas de moi !) se réveillait de sa sieste et le babyphone nous fait donc entendre quelques couinements alors que Poussin et moi jouions. Je lui fais remarquer qu’il y a eu un bruit de Belette, et lui de me répondre « non c’est un chien »…Sous-entendu, non non pas la peine de te déplacer, on peut continuer à jouer ! Bon, il a insisté 5 bonnes minutes avec son histoire de chien et il avait vraiment l’air embêté de perdre mon exclusivité, mais en expliquant calmement et fermement, avec un gros câlin en prime, c’était réglé  Et depuis on en rigole en se demandant quel animal ça peut bien être lorsque le babyphone se déclenche ! Parfois elle fait des cris tellement effrayants qu’on jurerait entendre un troll de la forêt ;o)

Etre une maman en partage, c’est fatiguant, usant, culpabilisant et parfois énervant. Mais quand on termine une journée en ayant l’impression que chaque enfant a eu l’attention qu’il voulait, qu’on a pu passer de bons moments tous ensemble et qu’on a aussi pu profiter de quelques tête-à-tête avec chacun, c’est bien agréable ! Si un jour j’arrive à trouver une recette pour doubler ma patience et me faire pousser un troisième bras, on tentera le challenge du petit troisième…ou pas ;o)

Certaines n’avaient jamais vu la mer…

Certaines n’avaient jamais vu la mer…

Certaines n’avaient jamais vu la mer, de Julie Otsuka, c’est le roman que je viens tout juste de terminer. Et j’ai aimé !

Par habitude mais aussi par goût, je lis surtout de grands classiques, et finalement très peu de romans contemporains. C’est très sûrement un tort et je rate certainement quelques pépites, mais aussi étrange que cela puisse paraître, j’ai le sentiment que je dois terminer l’ancien avant d’entamer le nouveau… J’ai pensé à m’enfermer dans une grotte avec des tonnes de livres de poche ou un Kindle plein de classiques gratuits, mais je doute en venir un bout un jour ! Alors parfois je fais des sauts de puce en littérature contemporaine et ma foi ce n’est pas désagréable. Récemment, après avoir passé un bon moment avec les Rougon-Macquart puis avec Anne Frank (en vue de notre week-end à Amsterdam, pour ceux qui suivent !) j’avais envie de changer un peu. Faute de librairie à deux pas de chez moi, je fouinais sur un site de vente en ligne, et je suis tombée sur Certaines n’avaient jamais vu la mer, estampillé rentrée littéraire 2012. Je me suis souvenu que j’en avais entendu une bonne critique (avec interview de l’auteure me semble-t-il) quelques semaines plus tôt à la radio, dans l’Humeur vagabonde (France Inter). Je cite l’émission au passage parce qu’en plus d’adorer le générique, j’aime souvent les présentations qui y sont faites et qui me donnent envie de lire le livre ou voir le film dont il est question. Si je manque de temps pour le faire, ça me donne au moins l’impression de ne pas être trop à la ramasse niveau actualité culturelle !

Bref, j’en reviens à Certaines n’avaient jamais vu la mer, dont le sujet est assez méconnu, en tout cas en France : l’immigration des Japonais aux Etats-Unis pendant la première moitié du XXème siècle. Et plus particulièrement des femmes Japonaises. Le roman commence par la traversée du Pacifique de ces toutes jeunes filles, majoritairement issues des campagnes, qui vont rejoindre en Amérique des maris choisis à distance. Les maris sont également Japonais, leur arrivée sur le sol américain est plus ancienne, et ils sont plus âgés que les jeunes épouses. Les rencontres et mariages s’étant organisés par lettres, ils ont vendu du rêve aux très jeunes filles (certaines n’ont que 14 ans), leur ventant des situations florissantes, une intégration parfaite, la promesse d’une vie idyllique, loin des champs et de la misère du Japon… En descendant des bateaux, les jeunes filles découvriront la violence de la réalité et des conditions de vie difficile. Le livre raconte, à la première personne du pluriel, la nouvelle existence de ces femmes. Leur rencontre souvent brutale avec leurs maris, leur découverte des Etats-Unis, du mépris dans le regard des Blancs…Leurs débuts comme ouvrières agricoles, comme femmes de chambre, la naissance de leurs enfants, leurs  évolutions au sein de leur communauté… Jusqu’à ce que la Seconde Guerre mondiale ne divise le Japon et les USA et que les émigrés soient considérés comme une menace, puis installés dans des camps dont ils ne ressortiront qu’à la fin du conflit.

Le « nous », qui fait parler toutes ces femmes d’une seule voix, donne toute sa force au roman. Il mêle leurs destins, tellement proches malgré leurs différences, et renvoie bien évidemment à l’aspect collectif de leur sort. Ensemble elles ont quitté leur pays pour traverser le Pacifique, et c’est ensemble qu’elles se retrouveront internées à la fin du livre. Toutes traversent les mêmes grandes étapes de la vie, même si des détails varient. Ce que montre d’ailleurs très bien Julie Otsuka en agrémentant à chaque fois son récit de quelques exemples, sur la façon dont telle ou telle femme a vécu un évènement pourtant commun à toutes. Le « nous » donne de la force et de la puissance à l’existence de ces femmes souvent misérables, discrètes voire insignifiantes. Il nous aide également à prendre conscience de l’ampleur de cette population oubliée par l’Histoire. Le rythme ainsi créé peut être déroutant sur les premières pages, mais il devient rapidement entraînant et rend la lecture agréable. Le livre étant en plus assez court, il se lit vite et de façon très fluide.

S’il y a un détail que j’ai moins aimé, c’est l’utilisation du « nous » qui se poursuit alors que la narration change de point de vue à la fin. A partir du moment où les Japonais sont exilés et ont déserté leurs villes d’adoption, la narration passe en effet du côté américain. On suppose qu’il s’agit toujours d’un choeur de femmes, blanches et aisées cette fois, qui décrit la ville et évoque les réactions des habitants après le départ de leurs voisins nippons. Avoir ce nouveau point de vue et continuer à voir la ville sous ce nouvel aspect est vraiment intéressant  et j’aime beaucoup le principe. Sur le fond j’adhère également avec le fait de passer d’un choeur de femmes à l’autre, mais à la lecture j’ai trouvé la transition difficile. Je ne sais pas trop comment l’expliquer, mais j’aurais voulu rester plus longtemps avec mes immigrées japonaises, j’ai eu l’impression que les américaines leur piquaient la parole ! Et après tout, ce changement de narration brutal reflète plutôt bien l’exil forcé qu’ont du subir les toutes jeunes filles du début, devenues des femmes au cours du roman. Au sens propre comme au figuré, on leur a donc coupé la parole !

Pour conclure, je conseille vraiment ce bouquin, qui m’a fait passer un bon moment de lecture et qui m’a renseignée sur tout un pan de l’Histoire que j’ignorais complètement. Je suis particulièrement difficile en lecture (en plus d’une trame qui me plaise, j’ai besoin de prendre du plaisir à lire, de savourer les mots, la musique des phrases…) et j’ai été agréablement surprise. J’ai un peu (beaucoup !) dévoilé le contenu du livre, mais je pense vraiment que ce n’est pas le plus important, puisque ce n’est pas du tout un livre à suspens. Sa richesse se révèle essentiellement à la lecture, dans l’énumération des détails, dans la tournures des phrases, bref je n’ai finalement rien dévoilé qui gâcherait la découverte de ce livre ;-)

Certaines n’avaient jamais vu la mer

 

Arrête de parler et mange !

Arrête de parler et mange !

Il a un peu plus de 2 ans et demi, et il parle de mieux en mieux. Tous les jours il progresse apprend de nouveaux mots, s’essaie à la conjugaison, ré-utilise nos expressions. On raconte des histoires, on décrit des images, on commente ce qu’on voit, il parle à son bébé, lui chante des berceuses, téléphone à Mamie, fait semblant d’appeler d’autres gens et leur raconte ses journées, il lit des livres à sa petite soeur, et très souvent il nous fait fondre !

J’adore suivre son évolution, voir comment en quelques jours il arrive à s’approprier une nouvelle règle de grammaire, comme il peut passer d’un seul coup une nouvelle étape ; et j’aime me rendre compte qu’il comprend chaque jour un peu plus le monde qui nous entoure. J’aime discuter avec mon Poussin, le comprendre et pouvoir répondre à ses questions. De son côté, il est fier de pouvoir nous expliquer ce qui l’intéresse, de nous faire partager ce qu’il pense, ou tout simplement de nous dire ce qu’il veut ou ne veut pas. Clairement, la frustration est bien moindre lorsque l’on se comprend ! Pour lui comme pour nous. Ayant eu l’occasion de faire un peu de linguistique pendant mes années de fac, je suis particulièrement sensible à la question du langage chez les enfants, et observer comment se développent les mécanismes de grammaire/vocabulaire/conjugaison chez mon Poussinou me passionne réellement. Je trouvais déjà cela passionnant à l’époque, maintenant que le sujet me concerne de près, je suis encore plus captivée !

Ses progrès nous rendent fiers, ses mots d’enfants nous amusent, et c’est un réel plaisir que de le voir communiquer avec les autres. Et bien sûr, il parle parfois un peu trop… Il maintient le volume sonore de la maison à un niveau beaucoup trop élevé, il n’est silencieux que pendant son sommeil, et il s’incruste dans toutes nos conversations. Alors forcément, encore plus qu’avant, nous surveillons notre langage… Non sans efforts, nous arrêtons de donner des surnoms aux gens qu’il est susceptible de croiser  (surtout quand les gens ne sont pas au courant de leurs surnoms, et que les surnoms ne sont pas spécialement affectueux…),et  nous limitons les gros mots ainsi que les mots « limites » (l’argot mignon comme chicots ça passe, par contre ça pue ou c’est dégueu, j’ai un peu plus de mal !). Mais forcément nous sommes faillibles… Poussin le malin, qui peut facilement retenir des mots compliqués comme stéthoscope, rhinocéros ou scie japonaise, n’a aucun mal à emmagasiner des mots beaucoup moins classes ! Le fourbe a toujours les oreilles qui traînent, il écoute, il retient, et il replace ces mots au bon moment, de préférence quand on s’y attend le moins ! S’il a un public à épater et s’il peut embarrasser ses parents, c’est encore mieux. Et là on pense forcément au fabuleux « j’ai mis la brosse dedans les chiottes » claironné il y a quelques mois en entrant dans le salon où la voisine était invitée…

Notre Poussin se transforme donc parfois en charretier ! A l’entendre, je me dis souvent que ah oui quand même, j’évite les mots les pires, mais que je devrais contrôler un peu plus mon vocabulaire. Bon j’avoue que je trouve parfois ça drôle, quand même, du moment qu’il n’est pas trop grossier… Tout en lui faisant remarquer que les mots qu’il utilise dans ces moments-là ne sont pas tellement jolis. Petit florilège de ces dernières semaines :

Maman tu coupes comme un bourrin ou Maman tu galères là…  en me voyant préparer à manger

La grenouille elle se barre, en commentant une image sur un jeu

Non, le garage ça me saoule… en réponse à ma proposition d’y jouer encore un peu

Je fais gaffe en faisant l’andouille sur le toboggan

Là où je suis rassurée, c’est qu’hier soir nous avons joué à trouver des synonymes du mot « toilettes », et qu’après « water » et « cabinets », il était à court d’idées ! Moi beaucoup moins, mais je me suis bien gardée de lui réciter toute ma liste ;o)

PS : Depuis ce week-end nous avons un Vocabulon des Petits à la maison, et je sens que nous avons là des heures de jeu devant nous ! Le jeu semble vraiment complet et les règles sont modifiables à l’infini, les possibilités multiples pour s’adapter aux besoins de l’enfant et suivre ses progrès. (Non, je ne suis même pas sponsorisée, mais au besoin ça peut se négocier :-D )