Archives mensuelles : juin 2013

« Un cadeau pour la maicresse »

« Un cadeau pour la maicresse »

Dimanche soir, fin de semaine passée avec 2 petits maladous à gérer, dont une qui a réussi l’exploit de vomir au lit une bonne 1/2 douzaine de fois… Ce n’était même pas une gastro, mais « juste » un coup de froid chopé  à la piscine le week-end dernier, doublé d’une poussée de prémolaire ! Belette a toujours eu la gerbe facile, et elle continue sur sa lancée (on croise les doigts, pour l’instant tout va bien en voiture). Bref, après toutes ces journées et soirées passées à nettoyer, étendre des machines de draps, câliner un bébé chouinant, je suis hyper fatiguée et bien sûr c’est à mon tour d’être malade… Pour le plus grand bonheur de Papa-des-Champs, je ne vomis pas dès que je tousse ! Malgré cette attaque de microbes, la vie est belle, le soleil revient, et les vacances arrivent à grands pas ! Encore une semaine d’école et mon Poussin connaîtra ses premières grandes vacances.

Qui dit grandes vacances dit fête de l’école (c’était samedi) et cadeaux pour les maîtresses et atsem, surtout quand elles sont aussi chouettes que celles de Poussin ! En tout, nous avons 4 personnes à gâter : la maîtresse de d’habitude, la maîtresse du mardi, A et M les deux atsem qui alternent entre matin et après-midi selon les semaines. Il y a quelques temps la grande question s’est donc posée : on leur offre quoi ??? Entre l’envie de faire plaisir, d’être un peu originaux, de ne pas se planter, de ne pas se ruiner, le temps qui manque parfois, pas facile de trouver. L’année dernière Poussin quittait sa géniallissime halte-garderie nantaise et faute de temps (Belette qui était tout bébé, le déménagement quelques jours plus tard…) j’avais opté pour du facile/rapide en achetant un assortiment chez un confiseur-chocolatier, regrettant le côté impersonnel du cadeau. Heureusement Poussin avait peint une magnifique carte pour rattraper le coup ! Cette fois je voulais donc du fait-maison et bizarrement l’idée m’est venue assez vite de confectionner des bourses en cuir, que Poussin remplirait avec des petits dessins, petits coeurs ou autres accessoires. Il y a quelques moi Papa-des-Champs s’était acheté 2-3 trucs pour se lancer dans « le cuir » (oui, il a des idées bizarres parfois) et ça m’avait donné drôlement envie d’essayer aussi. Lui avait confectionné des housses pour ses scies japonaises, mais comme je doute que les maîtresses et atsem manient beaucoup ce genre d’outils au quotidien, j’ai préféré l’idées des bourses. Et oui, vous pouvez penser à des associations d’idées pourries en imaginant le fait de manier des bourses, faites-vous plaisir ! Je rappelle que je suis malade, soyez indulgents :o)

Fabriquer des bourses en cuir c’est tout simple. Sur le net on trouve assez facilement des pièces de cuir, d’épaisseurs diverses et avec plein de coloris disponibles. Plus l’épaisseur du cuir est fine plus il est souple (0.6 ou 0.8 mm pour les bourses). L’objectif est donc de découper un cercle de cuir d’environ 20cm de diamètre, à l’intérieur duquel on percera des trous réguliers à l’aide d’un emporte-pièce, puis d’y passer un lacet. On tire sur le lacet, et hop ça fait une petite bourse ! Mes explications sont très succinctes, les photos seront certainement plus parlantes. Si vraiment le sujet vous intéresse, en tapant « patron bourse en cuir » sur un moteur de recherche vous trouverez de bien meilleures explications :o)

Si nous avions eu plus de temps, Papa-des-Champs aurait découpé des petits coeurs en bois que Poussin aurait peints, mais là ça n’a pas été possible. Finalement j’ai découpé des coeurs en papier cartonné que Poussin a (laborieusement) coloriés et décorés. Moyennement esthétique mais mignon !

Découpe du cuir au scalpel, même pas peur !

Découpe du cuir au scalpel, même pas peur !

Un emporte-pièce, un marteau, du bruit, des trous !

Un emporte-pièce, un marteau, du bruit, des trous !

Passage du lacet de cuir, et c'est magique !

Passage du lacet de cuir, et c’est magique !

Un petit "tortillon" maison pour coincer le fil et faire plus joli (si j'y avais pensé plus tôt j'aurais commandé des perles...)

Un petit « tortillon » maison pour coincer le fil et faire plus joli (si j’y avais pensé plus tôt j’aurais commandé des perles…)

Tadam ! Quatre bourses remplies de petits coeurs colorés

Tadam ! Quatre bourses remplies de petits coeurs colorés

Pardon d’avance pour les éventuelles fautes de frappe, d’orthographe voire d’accords… j’ai relu le billet avant de poster mais la fatigue me rend certainement moins efficace que d’habitude !

 

Je suis leur prisonnière

Je suis leur prisonnière

Un mercredi ordinaire, seule avec mes enfants de leur lever à leur coucher, et encore un peu plus. Rien de bien spécial à faire, presque pas de ménage ni de linge à gérer (soit je m’arrange pour être un minimum à jour, soit ça attendra), une fin de rhume pour les chatons, un soleil assez présent pour nous permette de passer pas mal de temps dehors. On a ri, on a joué, j’ai aimé qu’ils se cachent dans mon dos pour ensuite me faire des bisous à tour de rôle sur les joues, ils ont plutôt bien siesté et j’ai pu bouquiner un peu, j’ai respiré la merveilleuse odeur de leurs cheveux pendant nos câlins à trois, ils ont été hilares en jouant ensemble à cache-cache… Ils m’ont rendu heureuse mais ont aussi fait de moi leur prisonnière. Un mercredi ordinaire dans une prison de tendresse.

Comme tous les parents du mercredi (et des autres jours aussi !), j’ai répondu à leurs besoins, géré leurs agacements, essuyé leurs nez qui coulent, j’ai tenté d’apaiser leurs impatiences, j’ai nettoyé leurs becs plein de goûter, savonné leurs dos tellement doux, demandé cinquante fois de faire moins de bruit, joué selon leurs désirs.

Il y a des jours comme ça où je suis toute à eux, et où ça me plaît autant que ça m’aliène.  Prisonnière de leurs besoins et de leurs désirs. Aujourd’hui ça a commencé tôt, bien trop tôt même puisque Belette a atterri dans mon lit à 6h40, larguée entre mes bras ensommeillés par un Papa-des-Champs prêt à partir à Paris. (Et d’ailleurs si vous saviez comme j’envie parfois ses mercredis-paris où il n’entend aucun chouinement d’enfant et où il peut lire / dormir / glander dans le train !) Bref, j’ai donc reçu  dans mon lit un adorable paquet doux et chevelu, mais également tout chaud de fièvre et chouinassant. Un chouinement lancinant qui se mue en hurlement strident à la moindre contrariété… Une Belette qui se frottait trop les yeux pour avoir vraiment fini sa nuit, mais qui visiblement n’était pas non plus tellement décidée à dormir. Je crois qu’elle a quand même fini par sombrer puisque lorsque j’ai ensuite senti son petit doigt dans mon nez il était déjà 7h50. Trop chouette le réveil ! Et puis bien sûr ma captivité s’est poursuivie toute la journée. Encore à l’heure où j’écris ces lignes, je suis à la merci du babyphone qui pourrait m’appeler à tout moment, je limite le son de la radio, et j’irais ensuite prendre ma douche en traversant le couloir à pas de loup.

Ils ont réclamé à manger, l’une d’entre eux a même grogné jusqu’à ce que je lui présente son assiette de haricots verts, mais au bout de quelques bouchées n’en voulait déjà plus… Quelques heures plus tard elle m’a fait le même coup avec de la brioche (non, je ne cuisine pas hyper mal, mais rappelez-vous ils sont malades et n’avaient donc pas faim !). Ils n’ont pas mangé beaucoup de chocolat mais ont quand même réussi à s’en foutre partout… Telle une Blanche Neige qui ne servirait que deux nains j’ai rangé, épongé, nettoyé pour eux. J’ai répondu aux questions les plus farfelues de Poussin, j’ai expliqué pourquoi le Père Noël n’apporterait pas une seconde cuisinière en bois puisqu’il en a déjà une, j’ai dit que je n’achèterais pas d’iguane (mais où va-t-il chercher tout ça ???) mais qu’il pourrait bien sûr en avoir un chez lui plus tard. J’ai aidé à mettre des chaussettes aux nounours, j’ai fait glisser des Playmobils sur un toboggan 20 fois de suite pour ne pas éveiller le courroux de Belette, j’ai fait semblant de lui manger les mains avec la marionnette Louloup un peu pour les mêmes raisons, mais aussi parce que son rire est si éclatant quand le loup la croque ! J’ai été obligée de répéter encore et encore à l’un de ne pas mettre la langue quand je lui brosse les dents, à l’autre de ne pas bourriner sa main dans sa couche sale… Prisonnière des rituels j’ai du embrasser les doudous et répéter les formules magiques de ses nuits (« on est juste à côté, tout à l’heure Poussin va dormir dans la chambre d’à côté, et ensuite papa et maman dans la chambre encore à côté, allez, bonne nuit ma toute douce »). Un peu plus tard j’ai du faire des bisous « qui font pas de bruit » sur deux autres joues, puis encore quelques « bisous qui claquent », et rester sur le pas de la porte pendant qu’il me souhaitait « bonne nuit, dors bien, bonne couette, bon oreiller, bon matelas, bonne housse de couette »… J’y serais encore si je n’avais pas dit fermement que là ça suffisait !

Je suis la prisonnière de geôliers adorables, pénibles, malins, mignons, chiants, exigeants, rieurs et magnifiques ! De geôliers que j’aime plus que tout et qui m’apportent tant. Je suis une prisonnière qui s’est rendue toute seule, heureuse et souriante, avec des tonnes d’amour à distribuer !

** A peine avais-je terminé mon brouillon que Poussin m’appelait en hurlant pour un cauchemar, et après ma douche il ne s’était toujours pas rendormi…

Papa-des-Champs vient de rentrer, je vais me livrer prisonnière pour lui aussi ! Enfin lui il se démerde pour se laver les dents et s’essuyer la bouche !

En devenant maman…

En devenant maman…

… ça a changé quoi ?

Il y a quelques jours, Papa-des-Champs me faisait remarquer à quel point la maternité fait évoluer les femmes et modifie certains traits de leur personnalité. Il me cite quelques exemples de jeunes ou futures mamans, proches ou moins proches, qui sont ainsi devenues plus épanouies pour les unes, moins stressées pour les autres, joyeuses, apaisées, etc etc. Et c’est vrai, c’est flagrant comme parfois il suffit de tomber enceinte pour que l’angoissée devienne étonnement sereine, ou pour que celle qui voyait tout en noir se retrouve rayonnante. Le changement peu s’opérer pendant la grossesse, ou à la naissance du bébé. Evidemment, suite à cette conversation je me suis demandé ce qui avait changé chez moi, si le fait de devenir maman avait été positif dans mon caractère ou mon comportement.

Le changement a commencé pour moi dès que nous avons pris la décision de faire un bébé. Le positif, c’est que d’emblée j’ai arrêté de fumer. Et Papa-des-Champs aussi, d’ailleurs. Du jour au lendemain ou presque. Nous qui fumions une bonne dizaines de clopes par jour, et qui n’avions pas du tout le projet d’arrêter, en prenant la soudaine décision de fonder une famille nous avons également pris celle de ne plus acheter aucun paquet. Et nous avons réussi ! Bon, j’avoue que pour ma part j’ai racheté un seul paquet, que j’ai fumé à hauteur de 2 ou 3 cigarettes par jour avec dégoût, et que ça a fini par tellement m’écœurer que je n’ai jamais recommencé. Tout au long des 18 mois qu’il nous a fallut pour concevoir Poussin, nous n’avons jamais flanché. La perspective de devenir parents nous a donné une force de dingues ! J’ai ensuite complètement pété un boulon en voyant mon ventre désespérément vide et j’ai frôlé la dépression en passant les pires mois de ma vie (j’en parlais ici), mais sur quelques points au moins mon projet de maternité m’a rendue courageuse. Autre grande évolution, sur le même registre, cette entrée dans le monde médical a presque guéri ma phobie des aiguilles et des prises de sang. Bref, tous ces changements n’étaient pas tellement visibles par notre entourage qui ignorait tout de notre désir d’enfant, on va donc dire qu’ils ne comptent pas tellement pour l’illustration de mon article, mais ils ont leur importance pour nous.

Ce que nos proches ont pu constater pendant ma première grossesse, c’est que j’étais terriblement épanouie ! Neuf mois de plénitude, de bonheur, de grande forme et de sourires. J’étais heureuse et sereine. Je n’ai pas angoissé et j’ai tout géré comme une chef, jusqu’à l’accouchement qui s’est merveilleusement bien passé. Quatre heures montre en main entre la première contraction et la sortie du poussin, pas de péri, périnée intact, un rêve ! Tout le monde a loué mon courage, ma résistance à la douleur et mon incroyable bonne mine sur les photos. Moi qui me trouve toujours pitoyable en photo, j’avoue avoir été estomaquée de me trouver si jolie quelques minutes seulement après avoir accouché. Un ami qui est d’ordinaire plutôt avare de compliments m’avait trouvée « rayonnante », ce qui m’avait profondément flattée. C’est ensuite que ça a cafouillé…

C’est en pensant à ce qui a suivi cet état de grâce, qu’en essayant de trouver ce que la maternité avait changé chez moi, la seule réponse qui m’est venue est celle ci : je suis devenue chiante !

Depuis que je suis maman, outre ma patience quasi inexistante et mes cris de poissonnière (que je qualifierais presque de classiques et d’inévitables), je trouve que j’ai tendance à m’énerver beaucoup plus qu’avant et à imposer mes habitudes aux autres. En un mot : chiante ! Moi qui avais l’habitude d’être conciliante et de ne jamais m’imposer, j’ai maintenant l’impression de m’agacer ouvertement lorsqu’on essaie de mettre en péril mon organisation, et de ne plus hésiter à râler quand ça m’embête vraiment trop. J’ai ainsi été désagréable avec ceux qui prolongeaient leur visite trop longtemps à la maternité alors que mon bébé était fatigué, j’ai imposé mes heures de rdv à la maison et fait la tronche quand les invités arrivaient en retard, j’ai envoyé promener, j’ai fait chié (si, si !) parce que tel endroit ne me convenait pas, parce que là il faisait vraiment trop chaud pour mon bébé, parce que le bruit était trop fort, parce que, parce que, parce que…. Bref, je pense sincèrement être passée pour une chieuse, même si de mon point de vue toutes mes râleries étaient justifiées et n’avaient pour objectif que de préserver mes enfants. N’empêche que de m’apercevoir que la maternité m’avait rendue chiante, ça m’a fichu un coup. J’aurais bien aimé, moi aussi, que les gens me trouvent plus épanouie et plus heureuse… J’ai tellement désiré devenir maman, j’ai tant de fois essayé de faire au mieux avec mes petits, j’ai eu l’impression de faire tellement d’efforts, que je n’ai pas trouvé ça juste du tout ! Se remettre en question en permanence, organiser toute notre vie pour coller au mieux au rythme de nos petits chéris, se préoccuper tellement de leur bien-être, et aller parfois jusqu’à se sacrifier pour réaliser que je suis juste chiante, c’est vraiment la loose !

Dépitée par cette prise de conscience, j’ai quand même fini par réfléchir un peu plus loin que le bout de mon nez pour comprendre qu’en fait, je n’étais pas vraiment chiante mais surtout beaucoup plus sûre de moi. Et c’est vrai ! Devenir mère m’a donné confiance en moi et me permet tout simplement d’oser ! Je n’ai plus peur de donner mon avis et d’imposer mes choix quand c’est nécessaire. Parce qu’après tout c’est normal de respecter le sommeil d’un tout-petit, de faire en sorte qu’il puisse manger dans de bonnes conditions, et que c’est notre rôle de parents de veiller à ce que nos proches jouent le jeu. Avec la naissance de mes enfants j’ai gagné l’assurance qui me faisait défaut et qui m’a tant de fois empêchée d’avancer. Alors bien sûr je ne l’ai pas toujours bien gérée, d’où cette impression d’être une chieuse qui râle et se met trop facilement en colère, mais j’imagine (du moins je l’espère !) que j’arriverai à la dompter au fil du temps. D’autant qu’elle n’est pas que négative et qu’elle m’a également permis d’avancer. En devenant maman j’ai osé me fâcher fort avec des gens que j’aime, mais j’ai aussi trouvé la force de leur ouvrir de nouveau mon coeur et de leur dire combien ils manquaient à nos vies. Jamais je n’aurais eu ce courage avant. Pas plus que je n’aurais eu l’audace d’ouvrir ce blog ni de tenter une nouvelle aventure professionnelle. Si j’évolue chaque jour en tant que maman, et que j’apprends de mes erreurs pour devenir meilleure, cette progression concerne aussi ma personnalité et ma façon d’être en tant que femme. Il y a encore du chemin, bien sûr, mais j’ai malgré tout le sentiment que ça s’améliore. Si en attendant je passe encore pour une chieuse névrosée, dites-vous juste qu’en fait j’essaye simplement de dompter cette nouvelle confiance en moi !

Vous avez changé vous, en devenant maman ? (ou papa !)

 

Les Lisières, d’Olivier Adam

Les Lisières, d’Olivier Adam

J’ai découvert Olivier Adam il y a quelques années avec Je vais bien, ne t’en fais pas, d’abord en film puis en livre. J’ai tellement aimé le film de Philippe Lioret, qui m’a fichu une telle claque, que le roman m’a ensuite moins emballée. Un peu l’inverse de toutes les fois où je commence par lire un bouquin pour être ensuite déçue par l’adaptation ciné. Bref, j’ai quand même bien aimé l’écriture d’Olivier Adam et je suis sûre que si je n’avais pas vu le film avant j’aurais adoré le livre. J’ai ensuite lu Falaises, récit très sombre d’un jeune père hanté par le souvenir du suicide de sa mère. Un texte plein de mélancolie qui m’avait presque mise mal à l’aise mais dont j’avais apprécié l’écriture. En toute logique, il y a environ un mois j’ai ainsi lu Les Lisières. Ou plutôt, je l’ai dévoré ! Pour moi, c’est sans conteste le meilleur Olivier Adam que j’ai lu jusqu’ici.

Pour résumer, et pour situer un peu la thématique du roman sans le spoiler, il s’agit du récit à la première personne d’un jeune quadra père de famille fraîchement séparé. Romancier névrosé et dépressif, il se pose beaucoup (trop?) de questions, espère reconquérir sa femme mais s’y prend comme un manche, aime ses enfants et se désespère de ne plus partager leur quotidien, en veut au monde entier et commence à perdre pied. Installé en Bretagne mais ayant vécu à Paris et originaire de l’Essonne, il est contraint de faire quelques séjours dans la maison de son enfance où vivent encore ses parents. Parents auxquels il n’a plus grand chose à dire, avec lesquels il n’a jamais réellement partagé d’affection et dont il va devoir gérer l’intendance. Il ne supporte pas cette ville de banlieue qu’il a toujours voulu fuir et qui décuplera ses angoisses d’homme tourmenté, le replongeant dans les moments les plus sombres de son adolescence.

La banlieue pâlichonne dont parle O.Adam dans beaucoup de ses récits (et que l’on retrouve notamment dans Je vais bien, ne t’en fais pas) est la même que celle de mon enfance et de mon adolescence. La ville de V. où Olivier Adam et son narrateur ont grandit est en effet toute proche de celle où j’ai vécu jusqu’à mes 21 ans. Les lieux qu’il évoque me sont familiers puisqu’ils ont fait partie de mon enfance, et je me reconnais beaucoup dans sa vision de cette banlieue triste.  L’envie de partir et d’aller vivre ailleurs qui anime ses personnages est la même qui m’a tenaillée pendant toute mon adolescence. A l’instar de son narrateur, mon unique objectif était de m’inscrire à la fac à Paris pour déserter la morosité de la banlieue. Quand il a fallut se décider pour une filière, je n’ai pas hésité longtemps entre les deux qui m’intéressaient, et j’ai opté pour celle qui n’était pas proposée par l’université du coin. Pour être sûre de ne pas me faire coincer en banlieue. Les heures passées dans un RER D bondé m’importaient peu, je voulais Paris et je l’ai eu ! Quand Papa-des-Champs et moi avons eu les moyens de louer un appart’, il était évident pour nous de quitter ces villes dortoirs où tout nous paraissait nul. Nos finances de l’époque ne nous permettaient pas d’avoir beaucoup mieux qu’une boîte à chaussures dans le centre de Paris, et nous avons opté sans regret pour la petite couronne côté Bois de Vincennes. Un soulagement !

Cette espèce d’aversion pour la banlieue de notre enfance n’a rien à voir avec un sentiment d’insécurité ni avec de mauvaises expériences, mais essentiellement avec un énorme sentiment d’ennui. Mais aussi d’envie d’ailleurs et de laideur. Encore plus s’agissant de mes HLM moches que du lotissement de Papa-des-Champs ou du quartier résidentiel du narrateur des Lisières. J’ai souvent été, comme lui, affligée par les rues sans charme, la banalité des modes de vie et le conformisme de mes congénères (encore plus quand j’étais une rebelle de 16 ans, évidemment !), la culture au rabais, la beauferie et les grands centres commerciaux. Plus jeune j’ai souvent regretté l’absence de bonne librairie (il n’y avait même pas encore la Fnac d’Evry en ce temps-là!) qui aurait pu nous proposer un choix un peu plus vaste que le tabac/presse ou que le supermarché du coin… J’aurais aussi aimé un endroit un peu plus sympa que le bar PMU repaire de pochtrons pour prendre un café en journée… Bref, à 15 ans mes copines et moi ne rêvions que de Paris et n’imaginions pas une seule seconde faire notre vie dans ces villes sans âme. Comme le narrateur du roman, en tapant les noms de mes anciens camarades sur internet je suis toujours sidérée de voir que souvent, ceux qui voulaient le plus partir sont restés. C’est très snob, surtout pour une néo-bouseuse comme moi, mais voir que la goth artiste  qui rêvait d’ailleurs habite finalement dans le même immeuble que celui de son enfance, 2 étages plus haut que sa mère, ça me file le cafard. Comme ces filles populaires et ultra maquillées des années collège qui se retrouvent caissières au carrefour du coin ou ces anciens mecs rebelles qui se prenaient pour des poètes maudits et qui se retrouvent pions dans le lycée qu’ils détestaient tant… Bon, j’ai conscience que j’exagère un peu dans ma description de la banlieue et qu’il y a des endroits bien pires, mais comme le personnage du roman, je n’aurais pas pu m’y épanouir.

Ce rejet commun de la banlieue sud, ce goût partagé pour l’écriture et ce besoin de partir m’ont évidemment fait aimer ce roman. Mais Les Lisières ce n’est pas que ça. C’est aussi le cheminement intérieur d’un narrateur en totale remise en question, ses analyses, ses doutes, sa progression. Si à certains moments on a bien envie de lui mettre un bon coup de pied au cul pour le faire avancer, ce personnage est malgré tout attachant. Une espèce de stéréotype de mec torturé (qui peut faire penser à Beigbeder, la coke en moins) dont j’aurais pu tomber éperdument amoureuse à 16 ans… et que je suis contente de n’avoir jamais rencontré à 30 ! Le genre de type qui me rappelle combien mon mari équilibré est un bonheur à vivre même s’il ne m’a jamais écrit de poème enflammé et qu’il n’a pas fait de moi sa muse !

Pour finir, j’arrête de tout ramener à moi et je vais me concentrer sur l’écriture d’Olivier Adam. Une écriture simple, fluide et juste, jolie sans être prétentieuse, ni trop basique ni trop sophistiquée. On y perçoit la sensibilité de l’auteur et sa maîtrise des lettres : tout ce que j’aime ! La trame du récit est agréable, avec l’évocation de quelques souvenirs d’enfance souvent émouvants et une intrigue riche sans toutefois être trop complexe. Vous l’aurez compris, je recommande ! Allez, un seul bémol : le type brillant mais névrosé qui se torture l’esprit et est invivable, il ne faudrait pas en abuser. Vous allez vous dire que je suis une critique gentille et que j’aime toujours ce que je lis, mais en fait c’est surtout que j’ai la flemme de parler des livres qui ne m’ont pas plu ! Le jour où on m’offrira une rémunération sympa pour dézinguer les bouquins ratés, promis je ferai un effort !

En plus il a de jolis yeux...

En plus il a de jolis yeux…

Encore une fois, si vous avez lu Les Lisières n’hésitez pas à me donner votre avis en commentaire ! Par exemple Papa-des-Champs je sais que tu l’as lu, alors lâche tes comm’s !!!  Ah pardon, on me fait signe que je ne suis pas sur un skyblog et que je n’ai pas 13 ans… :op