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Le rythme des élèves (enfin !) pris en compte dans une nouvelle réforme scolaire ?

Le rythme des élèves (enfin !) pris en compte dans une nouvelle réforme scolaire ?

Cette semaine j’ai été interpellée par un article concernant la réforme des programmes scolaires. Pour une fois, j’ai été interpellée de façon positive, ce qui est assez rare pour être souligné ! Paru dans Le Monde étudiants (version web), il évoque la refonte du système de « cycles » en primaire. Si le titre met en avant l’idée selon laquelle le redoublement pourrait devenir obsolète (ce qui me paraît une bonne chose, sachant les conséquences négatives que ça peut avoir dans une scolarité), c’est la globalité du projet qui me paraît vraiment intéressante.

La publication est à lire ici : Article Le Monde-Campus.

Dans cet article-entretient, le directeur du CSP (Conseil Supérieur des Programmes) Michel Lussault définit les nouvelles orientations de cette façon :

« Nous avons profondément modifié l’approche actuelle, trop annuelle, de la scolarité, qui a comme effet détestable de mal définir les étapes importantes des apprentissages des élèves. La fin de l’année et le passage dans la classe supérieure ont trop d’importance »

Tout ça me parle énormément, et ça me rassure un peu de voir que les choses peuvent s’améliorer. Mes enfants sont scolarisés dans ce qu’on pourrait appeler une école de campagne, avec un faible effectif et surtout, les classes sont multi-niveaux. Chez nous, une classe rassemble ainsi tous les niveaux de maternelle ainsi que les CP, la seconde classe allant du CE1 au CM2. Mon Poussin et ma Belette donc n’ont fréquenté que la classe des petits pour le moment, et je dois dire que ce fonctionnement m’emballe complètement ! Les enfants ont plus de liberté dans leurs apprentissages et les choses sont moins figées. Le rythme de chaque enfant est plus facile à respecter. Concrètement, il arrive que les élèves qui présentent des facilités participent aux activités du « niveau » supérieur, et ceux qui ont plus de difficultés profitent des explications données aux plus petits.

« L’approche par cycle de trois ans, que nous proposons dans notre réforme, permet de caler les apprentissages dans un autre temps et de tenir compte de la réalité de chaque élève. »

Bon, l’article n’évoque pas de classe multi-niveaux, mais il a le mérite de mettre en lumière le fait que le découpage des niveaux est arbitraire et par là-même potentiellement inefficace. Il n’y a pas besoin de réfléchir beaucoup pour se rendre compte que non, tous les enfants nés la même année ne seront pas prêts à apprendre à lire en même temps… Ni même que les enfants n’auront pas tous pigé le principe de la multiplication à 8 ans et 2 mois… Je le vois encore plus depuis que mes enfants vont à l’école et que je constate les différences parfois énormes entre les élèves d’un même niveau. Cette année, mon fils est en moyenne section avec 4 autres enfants. Une petite copine et lui sont nés en janvier, tandis que les autres sont de fin d’année. Inutile de préciser qu’à cet âge, 10 ou 11 mois d’écart c’ est énorme ! Les connaissances ne sont pas les mêmes, et la maturité non plus. Par chance, le fonctionnement multi-niveaux, ainsi que le discernement des instits, permettent de proposer à chacun des activités motivantes et adaptées.

D’autre part, cela permet de différer la question d’un éventuel saut de classe. Les élèves ne sont pas figés dans le niveau relatif à leur année de naissance. Dans notre cas, l’année prochaine Poussin devrait suivre un programme à cheval entre la grande section et le CP. C’est assez rassurant de savoir qu’il avancera à son rythme sans pour autant entrer tout de suite dans des démarches administratives parfois compliquées.

Par ailleurs, propos du redoublement, les propos de Michel Lussault sont plutôt encourageants :

Si on admet que l’idée est de faire progresser les élèves dans un cycle, puis de les faire progresser dans un autre pour les mener, in fine, à la fin du cycle de scolarité obligatoire, la notion de redoublement n’a plus de sens. Elle n’est plus à considérer comme la solution pour remédier aux difficultés scolaires. Il ne servira à rien de faire redoubler un élève en CP alors qu’on sait que nous avons encore le CE1 et le CE2 pour amener l’enfant le plus loin possible dans les objectifs de ce cycle. Il existe d’autres manières d’identifier ces difficultés et d’accompagner les élèves. Le redoublement doit être limité à quelques cas très particuliers.

Je suppose que la mise en oeuvre de ce nouveau fonctionnement demandera un petit temps d’adaptation et peut-être que les professeurs des écoles devront modifier un peu leur organisation, mais dans les grandes lignes l’idée semble pertinente. Il y a encore du chemin à parcourir avant d’envisager un fonctionnement comme celui initié par Céline Alvarez (voir par là et par ici ) mais pour une fois que l’accent est mis sur le respect du rythme de l’enfant, ça donne un peu d’espoir !

Article à retrouver sur Les Vendredis Intellos !

Abécédaire en 26 chansonnettes (Boris Vian, Debout sur le zinc, Tomi Ungerer)

Abécédaire en 26 chansonnettes (Boris Vian, Debout sur le zinc, Tomi Ungerer)

Il y a des mois que j’ai envie d’écrire un billet sur ce livre-CD qui a un succès fou à la maison : Abécédaire en 26 chansonnettes. Il est temps de m’y mettre !

abecedaire vian

Cet album réunit tout un tas d’artistes que nous, les parents, nous aimons, et que nous avons eu envie de faire découvrir à nos enfants. Des petits textes écrits par Boris Vian, interprétés par Debout sur le zinc et mis en images par Tomi Ungerer, aux éditions Formulette.

Quand nous l’avons acheté (il y a environ 1 an), c’était surtout pour proposer aux enfants les petites chansonnettes, puisqu’ils étaient alors un peu jeunes pour s’intéresser vraiment à l’alphabet. En règle générale nous aimons bien faire découvrir « nos » musiques à nos poussins, ce qu’ils adorent, mais nous avons aussi remarqué qu’ils étaient friands de mélodies un peu plus axées enfants, avec des textes répétitifs, des mélodies faciles à retenir, etc. Le principe de la comptine leur plaît beaucoup. J’ai presque envie d’ajouter « à mon grand regret », parce qu’entre nous, moi j’ai un peu de mal avec les comptines traditionnelles ! Bon déjà les mélodies ont tendance à me taper sur le système, mais quand elles parlent de la guerre,  qu’elles en appellent au bon dieu, ou qu’elles véhiculent des notions comme la vengeance, ou le fait de taper voire tuer des animaux, et bien je les supporte encore moins ! J’ai donc sauté sur l’occasion quand j’ai découvert ces chansons pour enfants faites par de vrais musiciens et écrite par l’un de mes auteurs favoris !

Maintenant que vous savez pourquoi j’ai eu envie de découvrir Abécédaire en 26 chansonnettes, je vais tâcher de vous expliquer pourquoi nous l’avons définitivement adopté !

Les chansons sont vraiment chouettes, les rythmes sont variés (chaque chanson a vraiment son propre univers) et les enfants se les approprient facilement. Je ne vous le cache pas, on se les approprie tellement bien nous aussi qu’elles ont tendance à nous rester dans la tête… Surtout les jours où le CD tourne trois fois de suite… Il n’est donc pas rare que je me mette à chantonner :

Marcel monte sur sa moto,
Et va au marché
Vendre des mirabelles,
Marcel monte sur sa moto,
Un matin de mai
Avec son marmot

Mais à choisir, je préfère largement ça que de fredonner Meunier tu dors ou Joli coquelicot !
Je ne suis pas sûre de savoir intégrer un morceau de musique sur cette page donc je passe mon tour, mais j’ai vérifié et on peut trouver quelques pistes du CD en écoute sur des plateformes spécialisées (dont une qui commence par un Y et termine par -ube, pour ne pas la citer !).

Les textes de Boris Vian se prêtent d’ailleurs très bien à cette mise en musique. A chaque lettre correspond un personnage et donc une chanson le mettant en scène. On y retrouve la patte de Boris Vian, son humour et son amour des mots. Souvent ça ne veut pas dire grand chose et c’est un peu fou, et c’est encore mieux ! J’aime bien l’idée de faire découvrir cette avalanche de mots et de sons aux enfants, en leur donnant ainsi un avant-goût de la poésie. Poussin a d’ailleurs découvert pas mal de mots en écoutant ce CD. Je crois que je l’ai contaminé, parce que lui aussi aime découvrir des mots rigolos ou désuets, des expressions argotiques, et il aime les répéter ensuite en boucle ou les ressortir au quotidien.

L’année dernière il avait beaucoup aimé jacasse, farandole, zazou ou encore la magnifique expression « téter des tisanes » !

Abécédaire oblige, ce livre-CD permet également de se familiariser avec les lettres et les sons ! Poussin et Belette avaient respectivement 3 ans et 1 an lorsqu’on l’a eu, donc je me répète mais ce n’était pas l’objectif premier de cet achat. Poussin a tout de même montré assez tôt de la curiosité pour les lettres, et il a très vite commencé à s’y intéresser. Ecole de campagne oblige, sa classe est multi-niveaux et notre petit curieux aime tendre l’oreille quand la maîtresse s’adresse aux plus grands ! Les jolies lettres colorées du livre lui ont également beaucoup plu. Il a commencé par en reconnaître quelques-une et il était tout content de retrouver l’initiale de son prénom, celle de sa soeur, celle de Papi, etc.

Un autre bon point pour cet album: chaque lettre bénéficie d’une page où elle est présentée en grosse capitale. Bien pratique puisque c’est de cette façon que la maîtresse de Poussin fait découvrir les lettres aux enfants. On  retrouve également le texte de chaque chansonnette, où chaque occurrence de la lettre présentée est en couleur et en gras. Les enfants arrivent donc tout de suite à repérer la lettre en question. Je vous mets quelques photos pour compléter mes explications pas forcément très claires !

C comme Célestin

M comme Marcel

Pour finir, je vous restitue les paroles de la chanson du R, une de mes préférées !

Raoul recherche un rat
Qui a rongé le raisin
Raoul recherche un rat
Qui a rongé le raisin
Mais le rat rit et ronge
Rencogné dans le foin
Rongeur reste à la grange
Le ratier n’est pas loin
Le ratier n’est pas loin

Si vous aussi vous avez envie de faire entrer un peu de poésie et de folie dans vos maisons, en vous déhanchant sur des rythmes entraînants, je vous conseille vivement  l’ Abécédaire en 26 chansonnettes !

Cet article est à retrouver sur le site des Vendredis Intellos.

Diversification alimentaire : montrons-leur le bon exemple !

Diversification alimentaire : montrons-leur le bon exemple !

Lorsqu’on pense aux grandes étapes traversées par un bébé, la diversification tient une place importante. Bien nourrir nos enfants et leur donner de bonnes habitudes alimentaires dès le plus jeune âge, quel vaste programme ! Programme qui peut d’ailleurs vite se corser tant les jeunes parents sont souvent abreuvés de conseils, malheureusement pas toujours judicieux. Entre les « trucs » de belle-maman,  les conseils du médecin, l’avis de la nounou, ou les ouvrages pédiatriques qui divergent les uns des autres, pas toujours facile de faire son choix ! Le tout en jonglant avec un bébé qui boudera peut-être certains légumes, ne mangera pas beaucoup ou au contraire sera un véritable ventre sur pattes… Et je ne parle même pas des intolérances alimentaires, ni du choix purées maison / petits pots !

Chez nous tout ce qui concerne la nutrition est source d’intérêt et de réflexion, puisqu’il s’agit du secteur professionnel de Papa-des-Champs. Enfin, pour être exacte son travail c’est l’informatique, mais dans une société spécialisée dans le domaine de la médecine et plus particulièrement de la nutrition. Nous avons ainsi l’avantage d’être plutôt bien informés. Ceci  nous a peut-être parfois menés à être un peu tatillons, surtout avec notre premier enfant, mais à choisir on dira qu’il vaut parfois mieux être trop vigilant que pas assez ! Avec le deuxième enfant, comme pour tout le reste, on s’assouplit ! Bon, quoi qu’il en soit, même si notre alimentation n’est sans doute pas équilibrée à 100%, nous restons vigilants. Pas trop de gras, pas trop de sucre, et pas trop de produits industriels. Du bio si possible, plein de légumes et du fait maison la plupart du temps.

S’il est important pour nous de leur donner de bonnes habitudes nutritionnelles, apprendre à nos enfants à aimer manger est également l’ une de nos priorités. Aimer partager un repas en famille, prendre plaisir à goûter de nouveaux aliments, se sentir bien à table, à nos yeux tout cela est essentiel. Nous avons la chance de pouvoir prendre tous nos repas en famille, et dès que cela a été possible les enfants ont mangé avec nous. Avant même qu’ils puissent partager nos menus, ils étaient avec nous pendant les repas. A ce titre, les chaises évolutives nous ont toujours été très utiles, ainsi que le transat réglable en hauteur, qui leur permettait de zieuter dans nos assiettes avant même d’avoir des dents :-)

Comme dans chaque famille, il y a eu des phases plus difficiles que d’autres, et ce pour chacun de nos enfants. Poussin, lui, a tout de suite aimé manger et goûter à tout. Nous passions beaucoup de temps à cuisiner pour lui, puisque tout était fait maison, même les compotes ! Alors oui ça prenait beaucoup de temps mais le voir si heureux de manger compensait largement les soirées épluchage-mixage-pesage. Oui, j’ai longtemps pesé ses portions… Et oui, à partir de 14-15 mois nous avons continué les purées maison mais nous avons opté pour les compotes Babybio. C’était ça où mes mains décédaient d’eczéma… Un peu après son premier anniversaire il a eu quelques périodes pénibles où il boudait un peu la nourriture. Au départ à cause d’une bronchiolite pourtant pas bien violente mais qui lui a coupé l’appétit un moment, par la suite parce qu’il a compris qu’il avait là un excellent moyen de nous agacer. Globalement il a quand même toujours été plutôt facile à nourrir. Aujourd’hui il est un peu plus réfractaire à la nouveauté et se fait des fixettes sur certains aliments (comme par exemple les fils des poireaux ou certains poissons) mais disons que c’est de son âge. Il reste très gourmand de légumes et adore venir chiper des petits morceaux crus lorsqu’on prépare les repas !

Avec Belette, ça a été un peu plus compliqué.  Elle aussi à eu droit à du fait-maison (même les compotes au début, mais moins longtemps que son frère !) mais a très vite boudé les légumes pour se contenter des fruits et des yaourts. Entre  8 et 12 mois, nous avons franchement galéré pour la faire manger. Elle avait l’air de plutôt apprécier les légumes qu’on lui donnait, mais au bout de 3-4 cuillerées elle se bloquait net. Ça se finissait généralement avec un bib’ de lait, et elle se développait normalement, mais n’empêche que c’était un peu pénible à la longue. A priori ce n’était ni un problème de goût puisqu’elle avait l’air d’apprécier le début du repas, ni un problème d’appétit puisqu’elle finissait son lait et ses compotes. En parralèlle, elle était ravie de grignoter un peu de nos assiettes lorsque l’occasion se présentait. C’est après avoir testé plusieurs « trucs » (mixer plus ou moins les purées, lui laisser en morceaux bien cuits comme pour la DME – Diversification Menée par l’Enfant-, la faire manger avec les doigts, la faire manger en même temps que nous…) que nous avons trouvé la solution ! A partir du moment où Belette a eu dans son assiette exactement la même chose que nous, sous la même forme que nous, elle a mangé ! Au début j’avais franchement un doute quand au fait de manger tout en morceaux à tout juste 12 ou 13 mois, mais finalement ça n’a posé aucun problème ! Il a suffit d’adapter les quantités et de faire encore plus attention à l’équilibre des menus pour que ce soit raccord avec ses besoins et que ça roule. Aujourd’hui, Belette reste plus difficile que ne l’était son frère, et a un plus petit appétit, mais dans l’ensemble tout va bien. Elle aussi aime grignoter des morceaux de légumes crus et se goinfre d’épinards qu’elle attrape à pleines mains !

Toute cette introduction un peu longuette m’amène à vous montrer ce que j’ai trouvé la semaine dernière, dans la lettre des Vendredi Intellos :

Diversification alimentaire : Les bébés attendent le feu vert des parents

Lorsque je suis tombée sur cet article de Santé Log à propos de la diversification alimentaire, j’ai tout de suite été intéressée. Il décrypte une étude parue dans Psychological Science, qui suggère qu’en matière d’alimentation les bébés suivraient l’exemple donné par leurs parents :

[…]Après avoir vu un adulte mettre un morceau de légume dans sa bouche, les petits enfants identifient définitivement la plante comme une source alimentaire possible et sûre.

Ainsi, le fait que les comportements alimentaires des adultes induisent ceux de leurs enfants semble véritablement démontré. Bon, on s’en doutait un peu et je ne vois pas là une révolution scientifique, mais c’est toujours bien de voir que cette idée a été prouvée et validée. Cela ne peut qu’encourager les parents de jeunes enfants à être attentifs à leur propre alimentation et à leur façon de prendre leurs repas.

Les décisions « alimentaires » des petits enfants ne sont pas uniquement fondées sur l’apparence et une sorte de capacité de sélection naturelle, elles se nourrissent aussi de l’exemple de l’adulte.

Le choix d’un repas convivial à table, tous ensemble et dans la bonne humeur, semble ainsi la meilleure façon d’apprendre à nos enfants à bien manger. Si l’article parle essentiellement de la découverte de végétaux et de ce qui serait comestible ou non, nous pouvons supposer que le bon exemple est également de mise en ce qui concerne toute l’alimentation. Un bébé nourri seul dans son coin à un autre moment que le reste de la famille, des parents qui avalent un repas sans échanger un mot devant la télé allumée, des adultes qui ne mangent que des pizzas et des pâtes, voilà des situations qui ne faciliteront certainement pas l’épanouissement alimentaire de nos petits ! Sans pour autant devenir des ayatollah de la nutrition, il nous revient d’être un minimum attentifs à notre façon de faire. C’est aussi très chouette de partager un repas qui sort de l’ordinaire et de se régaler d’une soirée crêpes en famille, ou de faire un gâteau le mercredi après-midi, comme pour tout il faut savoir doser. Qu’il s’agisse de ce que nous mangeons ou de comment nous le mangeons, il faut juste avoir à l’esprit que c’est à nous de montrer l’exemple !

Sur ce, je vous souhaite un bon appétit !

Lecture d’article : « Animer des ateliers pour les pères incarcérés »

Lecture d’article : « Animer des ateliers pour les pères incarcérés »

J’entame aujourd’hui un nouveau projet d’écriture, qui me trottait dans la tête depuis un petit moment déjà : participer aux Vendredis Intellos ! Pour celles et ceux qui ne connaissent pas, et pour faire court, il s’agit d’un blog participatif où chaque vendredi ceux qui le souhaitent rédigent un billet sur un article ou un livre sur le thème de  l’éducation. L’idée est donc d’échanger des idées, des avis, de s’informer et d’apprendre de nouveaux trucs. Au niveau du fonctionnement c’est tout simple, le blogueur publie d’abord sur son blog à lui, puis diffuse son article sur les Vendredis Intellos.


Pour ma première participation, j’ai choisi de m’attaquer un thème assez particulier : les ateliers de parentalité à destination des pères incarcérés. J’ai découvert cette initiative dans le dernier numéro du magazine Grandir Autrement (n°44) qui propose une interview de Anne-Claire Ricot, intervenante extérieure en maison d’arrêt (propos recueillis par Sophie Elusse).

Avant même de lire l’article, j’ai été séduite par le principe de cette initiative originale. On entend parfois parler du travail en prison, ou de la reprise d’études, éventuellement de l’accompagnement psychologique, mais très peu de tout ce qui concerne la vie familiale. Or il me semble que c’est un axe fondamental. Ne pas oublier que les détenus sont souvent des pères, que leur paternité reste très fragile et qu’il serait bénéfique pour tout le monde de les aider à maintenir un lien filial, c’est assez basique mais ça mérite d’être souligné. D’autant qu’il s’agit de personnes pour lesquelles l’éducation et la parentalité demeurent des sujets épineux. Les sensibiliser à la non violence éducative est primordial, comme le souligne Anne-Claire Ricot dès les premières lignes :

[…]Si des personnes sont incarcérées, leur passé et leur enfance y sont certainement pour beaucoup. Les violences au sens large dont ils ont pu être témoins ou victimes au début de leur vie les ont forcément marqués négativement. Ne risquent-ils donc pas de reproduire cette violence sur eux-mêmes ou sur leurs enfants, sous une forme ou une autre? Le but est donc de sensibiliser les pères détenus aux conséquences dramatiques de la violence physique et psychologique sur les enfants.

Il m’arrive souvent de constater à quel point ma vision des choses en matière d’éducation est éloignée de celle de personnes qui ont pourtant un vécu proche du mien. Je m’étonne souvent de voir des parents de mon âge, de mon milieu, avec un niveau d’instruction et de culture plutôt bon, faire preuve de violence éducative ordinaire avec leurs enfants. Essentiellement psychologique et rarement physique, certes, mais ce constat me heurte quand même ! (Je ne prétends absolument pas faire mieux que les autres, il m’arrive encore de faire la poissonnière, mais je suis persuadée que certaines méthodes sont à proscrire dès lors qu’elles se basent sur l’humiliation ou la soumission). J’imagine donc sans mal que des détenus à l’enfance difficile aient du mal à se départir de la violence dans laquelle ils ont toujours baigné !

Cet article m’a également emballée parce que les difficultés rencontrées lors de ces ateliers sont présentées avec beaucoup de franchise et d’humilité. On y devine une réalité dure et on se rend vite compte que l’organisation d’un atelier dans une prison n’a rien de facile ! Nous sommes loin d’un tableau idyllique de pères soudainement passionnées d’éducation et prêts à s’investir dans le maternage (ou le paternage !). La souffrance de ces hommes est omniprésente. Ceux qui se confient lors des séances de paroles sont porteurs d’une histoire lourde et douloureuse. Beaucoup n’ont que très peu de contacts avec leurs enfants, certains sont déchus de leurs droits parentaux, et une infime minorité retrouvera une vie de famille à sa sortie de prison. Nous sommes tout de suite plongés dans la vraie vie carcérale :

[…]il n’est pas rare que le comportement des personnes présentes soit inadapté et peu propice à une discussion paisible et constructive (nonchalance extrême ou, au contraire, agitation et cris).

Outre cette absence de motivation, l’intervenante est confrontée à l’absentéisme des participants qui ne reviennent pas forcément d’une fois sur l’autre. Difficile donc de poursuivre un travail entamé le mois précédent ! Elle confie d’ailleurs son souci de renouveler sans cesse son discours et son approche, pour toucher à la fois les détenus venant pour la première fois et ceux qu’elle a déjà vus. Il s’agit donc de proposer un contenu pertinent à présenter en peu de temps, puisque chaque atelier ne dure que 1h30. Concrètement, au début du projet elle pensait amorcer le dialogue en proposant des articles ou des ouvrages axés sur l’empathie et la bienveillance. Elle a vite revu ses intentions :

Un jour en leur lisant un extrait d’ouvrage, apparemment simple, je me suis rendue compte, en discutant, qu’ils ne l’avaient pas compris et l’avaient pris au premier degré. J’ai pris la mesure du gouffre entre nos deux mondes.

Je vous avoue qu’à ce moment de ma lecture, j’ai commencé à douter… Honnêtement, je me suis demandé si tout cela servait vraiment à quelque chose et s’il ne serait pas plus judicieux de proposer ce genre d’ateliers à des gens plus susceptibles d’évoluer vers une éducation positive. Si sensibiliser les parents aux méfaits de la fessée ou de la violence verbale via les crèches, les écoles ou les maternités ne serait pas plus efficace ? Mais je me suis finalement ravisée. Parce que certes, en terme d’efficacité les résultats seraient meilleurs si on développait cette démarche auprès de familles réceptives et prêtes à évoluer. Mais apporter écoute et soutien aux détenus n’empêche pas d’informer le reste de la population ! Et surtout, aller à la rencontre de ceux qui n’ont pas d’autre moyen d’information (qui n’iraient pas d’eux-mêmes lire un bouquin de psychologie, ouvrir une revue de parents, etc) c’est leur permettre d’aller vers du mieux, même si la route est longue. Anne-Claire Ricot est d’ailleurs extrêmement lucide et avoue que son objectif n’est absolument pas de faire changer les mentalités comme par magie, mais essentiellement d’ouvrir le dialogue.

Posé ce constat, j’ai trouvé que la fin de l’article était beaucoup plus tournée vers le positif. Si la réalité des détenus est toujours dure, on y aperçoit toutefois le bénéfice des ateliers. En ouvrant un espace de dialogue et d’écoute, ils permettent aux pères de se soulager d’un fardeau qu’on imagine très lourd. En se sentant écoutés et respectés, certains gagnent en confiance en eux. Cette confiance retrouvée leur sera d’ailleurs un allié indispensable au moment de leur libération mais aussi dans leurs relations avec leurs enfants. Enfin, si l’accès à la lecture est compliqué pour beaucoup de ces pères, quelques-uns se montrent intéressés par les ouvrages que leur propose Anne-Claire :

La bonne surprise est que les participants aiment les feuilleter et me demandent souvent de les emprunter pour en lire certains passages dans leur cellule.

L’intervenante termine l’interview en expliquant qu’elle aussi sort grandie de ces ateliers et évoque une belle leçon d’humilité. Je suis finalement convaincue des bienfaits de cette initiative, et j’ai beaucoup de respect pour celles et ceux qui les organisent. Passé mon sursaut d’impatience, je suis persuadée que chaque progression, aussi minime soit-elle, est utile. Pour avoir moi aussi travaillé avec des personnes en difficulté sociale et affective, je sais comme on a parfois l’impression d’être face à une montagne tant les problèmes semblent s’accumuler… Mais je sais également que chaque progrès est un soulagement et que chaque petit pas est porteur d’espoir !